Jacques FILHOL, 87 ans, demeurant dans sa famille à Névian, est sans doute le dernier Français à percevoir par hérédité (de père en fils ainé uniquement) une forme de solde allouée aux anciens combattants méritants des campagnes napoléoniennes. D’un montant de 5.71 franc-or annuels (une fortune à l’époque !), alloué par l’Etat, ce pécule né d’un décret datant du mois de mai 1804, a traversé le temps pour s’éteindre un jour avec ce descendant de grognard, célibataire sans enfants.
Tout a débuté sur le champ de bataille de Iéna, le 14 octobre 1806, Napoléon, empereur des Français, auréolé de la gloire d’Austerlitz livre, face à la redoutable armée prussienne, une bataille sans merci. Les pertes françaises sont lourdes, les grognards tombent par milliers.
Mais l’ennemi, lignes de communication coupées, est en déroute. Par les curieux hasards de l’histoire, l’Empereur croise en ce jour de victoire, parmi les blessés, le chemin de Pierre FILHOL, un canonnier du 4e régiment d’artillerie, né à Montréal. Le pauvre garçon git à côté d’un canon, la jambe arrachée par un éclat d’obus.
« Soldat, que fais-tu ? » demande ému, Napoléon. « Je veille à mon poste » répond le jeune Audois. « Je me souviendrai de toi » murmura alors l’Empereur après avoir noté son nom.
Napoléon tiendra parole en récompensant Pierre FILHOL du rare titre de Majorat de France (l’ancêtre de l’actuelle Légion d’Honneur) pour acte de bravoure sur le champ de bataille. Ce titre honorifique est accompagné du solde-or annuel, d’une splendide baïonnette et d’un verre marqué de la lettre « N » tiré de la collection personnelle de l’Empereur.